Date de publication:

Histoire du vignoble de La Côte bourguignonne

Révisé en janvier 2023

Histoire du vignoble de La Côte bourguignonne en abrégé et sans fabulation.

→ Au premier millénaire / pas d’évidence

• Dans l’environnement de La Côte bourguignonne, les premières vignes n’auraient pas été plantées sur le versant mais au pied de celle-ci, dans la plaine adjacente à l’Est. Notamment, en 2008, une découverte archéologique révéla un vignoble gallo-romain enfoui dans la section en plaine de Gevrey-Chambertin. Son origine serait de la fin du 1er siècle ou du début du 2e siècle.
• Grégoire de Tours dans son ouvrage majeur ‘Histoire des Francs’ rédigé au 6e siècle fit une description intrigante situant des vignes dans les environs de Dijon : “Du côté de l’occident (depuis Dijon) sont des montagnes très fertiles, couvertes de vignes, qui fournissent aux habitants un si noble falerne (terme désignant un bon vin)”. Il parle manifestement de vignes de la jadis Côte dijonnaise des environs de cette ville, maintenant entièrement urbanisée.
• La donation de terres à Gevrey-Chambertin faite aux moines de Bèze en 640 incluait des vignes alors sans notoriété particulière et au périmètre inconnu quant à sa superficie et sa localisation exacte. En fait, les nobles crus de Gevrey-Chambertin ne seront véritablement reconnus qu’à l’Époque moderne, vers le 16e ou 17e siècle.
• Bien que des écrits du Moyen-Age l’évoquent, la donation au 8e siècle par l’empereur Charlemagne de deux hectares de vignes sur le climat ‘Le Charlemagne’ (un climat du Grand Cru Corton-Charlemagne) à la collégiale St-Andoche de Saulieu relèverait d’une légende.
• Enfin, il importe de faire ressortir qu’il n’y a pas de traces archéologiques indiquant que la colonisation en vignes de La Côte ait été concrètement amorcée avant le 8e ou 9e siècle. Ce ne sont en fait que quelques éléments d’histoire qui alimentent le scénario selon lequel la vigne y aurait été plantée de façon éparse, associée à la polyculture, au gré d’initiatives des puissants évêques de l’époque, puis des premières implantations de monastères bénédictins.

 


→ Les premiers siècles du deuxième millénaire / l’œuvre pionnière des moines

• Il y a très peu d’archives portant sur l’évolution viticole en Bourgogne au cours des douze premiers siècles de notre époque, soit avant la rédaction de manuscrits historiques par les ordres religieux et les institutions publiques locales. Les fosses stratigraphiques effectuées sur les versants de la Côte d’Or indiquent cependant une activité qui se serait accentuée graduellement entre le 9e et le 13e siècle. La vigne y a été d’abord plantée de façon éparse concurremment à des occupations primaires, tels pâturages et cultures maraîchères. La généralisation de la vigne sur les versants est postérieure.
• Des ordonnances de l’église suscitent la multiplication de cloîtres à partir du 9e siècle. Il s’ensuit le développement des vignobles abbatiaux, particulièrement en Bourgogne.
Les moines Clunisiens, dont la magistrale abbaye de Cluny est située dans le Mâconnais, sont les instigateurs du développement pérenne de la viticulture en Bourgogne. Quelque peu en retrait de La Côte, l’abbaye St-Vivant de Curtil-Vergy (à six km de Vosne-Romanée dans les Hautes-Côtes), intégrée dans l’ordre clunisien en 1087, est à l’origine des premières vignes plantées dans le secteur de Vosne-Romanée. Des Clunisiens furent aussi des pionniers importants sur le finage de Gevrey-Chambertin.
• La richesse et le faste entretenus par l’abbaye de Cluny rebutent certains moines qui souhaitent se dévouer à la règle stricte de Saint-Benoit. L’ordre rigoureux des Cisterciens est instauré par Robert de Molesme, qui fonde en 1098 l’Abbaye de Cîteaux à une dizaine de kilomètres à l’Est de Nuits-St-Georges, dans la plaine de la Saône. À partir de 1125, les Cisterciens remembrent le Clos de Vougeot sur une période d’une centaine d’années.
• Pour les moines, la gestion de vignobles relève de principes d’hospitalité, de commerce pour subsistance. Le vin a aussi des motifs de diplomatie et de consommation. Les Cisterciens sont autorisés à boire jusqu’à trois verres de vin par jour; chapitre 40: ‘usage modéré de vin, non jusqu’à plus soif’. Avides de vignes, leur patrimoine s’accroit prodigieusement en Bourgogne du 11e au 14e siècle: plusieurs centaines d’hectares de vignes en plusieurs endroits; leur notoriété ne sera consacrée qu’à partir du 18e siècle. Leur opiniâtreté immobilière procède d’incitations de donations, d’échanges immobiliers astucieux, d’arrangements successoraux, etc. Leurs pratiques vigneronnes initiales sont toutefois assez peu connues puisque les archives sont très fragmentaires. D’abord à but magnanime, leur foncier viticole devient au fil des siècles proprement commercial. Finalement, à l’aube de la Révolution, les Cisterciens sont des rentiers de la vigne.
• La Côte est progressivement colonisée de vignes par les entités religieuses, nombreuses, durant les premiers siècles du deuxième millénaire. Ce sont les frères convers, les moines ‘cols bleus’, qui travaillent aux vignes.
• Les moines de Cluny et de Cîteaux, et les évêques des diocèses d’Autun et Langres fixent les premiers jalons anthropologiques de la mosaïque des climats actuels, entre autres par l’érection de clos. Les clos sont alors éparses. Ceux connus aujourd’hui en tant que ‘climats’ portent déjà des noms notamment en guise de repères géographiques.
• Le vin est un breuvage certes agréable, mais aussi consommé parce qu’aseptique. L’économie du vin est alors très élémentaire. Il faut s’imaginer trois réalités de l’époque:
√ Les vins sont jadis pressés au pied avant que les pressoirs, alors très peu nombreux, servent à produire des cuvées rondes − d’assemblages de diverses provenances − assez anonymes. Il est néanmoins vraisemblable que les seigneurs, les évêques et les abbés (patrons des abbayes) savent reconnaître le meilleur et se le réserver.
√ Au Moyen Age, les vins ‘vermeils’ (issus de cépages rouges) sont peu cuvés (de un à deux jours en contact avec les peaux de raisins) et élevés brièvement. Bref ils sont de type clairet (les Bourguignons n’utilisent pas ce terme associé plutôt au Bordelais. Ils sont parfois rouges lors notamment de millésimes très mûrs. L’affirmation des terroirs en est réduite.
√ Les vins n’étant pas individualisés, la différenciation des terroirs, des crus, n’est pas encore un concept.

 

Toujours est-il …
Les Cisterciens, la qualité et les péchés (presque) capitaux.
À l’aube du développement de leurs vignobles sur La Côte, nul doute que les Cisterciens sont animés par la piété et des objectifs honorables. Aussi, toujours à l’origine, le gain n’est certainement pas une motivation, d’autant que l’économie des premiers siècles du deuxième millénaire est élémentaire et que la différenciation des vins, la plus-value, selon les terroirs n’est aucunement une réalité. Les moines sont des humains et, au fil du temps, quelques transgressions les guettent. Le désir assez excessif, sinon compulsif, d’agrandir leur patrimoine notamment par donations (contre la paix pour la fin des jours) suggère de l’avidité, une certaine cupidité. Leur vin constitue un cadeau envié par l’aristocratie de l’Église et par les Seigneurs, si bien que celui-ci leur confère du prestige et du pouvoir et stimule certes leur fierté et plausiblement un tantinet leur orgueil. Le commerce que les moines développeront tout au long du Moyen-Age, exempt de droits et de taxes, leur apporte la richesse qui renforce la cupidité. Cette notion s’apparentera à de l’avarice lorsque, à l’arrivée de l’époque Moderne, les entités moniales seront richissimes. D’ailleurs, ce capitalisme religieux n’est-il pas une cause de la Révolution?

• À travers nos nombreuses lectures portant sur l’histoire du vin en Bourgogne, nous n’avons rien lu qui stipule que la colonisation de La Côte par les Cisterciens relève concrètement d’une quête de qualité, qualité du vin s’entend. Pourtant sans cette quête, n’eut-il pas été plus judicieux pour eux d’éviter les harassements du travail en coteaux pour plutôt privilégier le pied de La Côte, ou la plaine, voire ailleurs? Par ailleurs, graduellement au fil de ce deuxième millénaire, avec un pic au 19e siècle, pour leurs besoins en vins communs les paysans réalisent une culture du gamay dans la plaine fertile, la plaine de la Saône, avec nettement moins de peine. La motivation de la colonisation de La Côte par les moines ne serait-elle pas celle du sacrifice étant donné l’âpreté de la viticulture sur La Côte, ‘à l’image des âmes à convertir’ (voir ‘vers 1098’ dans le volet couvrant du ‘9e au 12e siècle’ du segment Histoire / Antiquité et Moyen-Age )
• Au Moyen-Age, les vins de La Côte sont sommairement désignés selon trois ‘appellations’: Vins de Beaune (de Volnay à Corton), Vins de Nuits (environs de Nuits-St-Georges) et Vin de Dijon (vin du Dijonnais, de Dijon et ses environs, jusqu’à Gevrey-Chambertin, inclusivement).


→ 14e et 15e siècles / Le ‘marketing’ des Ducs de Bourgogne

• Quasiment tous les ouvrages couvrant l’histoire du vin de Bourgogne mettent une emphase sur l’association entre les Ducs de Bourgogne et le vin de Bourgogne. Les Bourguignons ont une forte estime pour les Grands Ducs, qui ont participé avec panache à la transition entre la fin du Moyen Age et le début de la Renaissance. Ils ont régné ‘en rois’ sur leur territoire, de la Bourgogne aux Flandres. Ils servaient du vin de Bourgogne lors de toutes les circonstances de relations publiques. Bref, le vin de Bourgogne est instrumentalisé pour accroître leur prestige, leur puissance. Les Ducs en furent certes les premiers grands promoteurs. La gloire du ‘Vin de Beaune’, générée par les Ducs, dura jusqu’au 17e siècle, puis connut une éclipse. La contribution des Ducs est toutefois tout autant culturelle que promotionnelle. Ils ont privilégié le Pinot noir et ainsi considérablement contribué à fixer ce cépage et des paramètres de qualité dans les coutumes viticoles de La Côte. Le Duc Philippe le Hardi (1342-1404) édicta une ordonnance consistant à bannir le gamay sur les meilleurs terroirs, cépage du peuple en raison de sa facilité de culture et de sa productivité. Plus tard, Philippe le Bon (1396-1467) interdit ‘l’extension des petits vins de production facile qui altère la qualité‘.


→ Époque moderne / l’avènement du (vrai) rouge de Bourgogne et les prémices de hiérarchisation

• Jusqu’à l’entrée en scène des négociants, à la fin du 17e siècle, ce sont des officiers assermentés par les conseils de villes qui ont la charge des contrôles sur les marchés locaux. En 1576, le conseil municipal de Beaune rend obligatoire la dégustation, le marquage et le jaugeage des tonneaux pour garantir l’origine des vins et ce sont des courtiers-jurés qui ont l’autorité sur le commerce avec l’extérieur. À Dijon ce sont des ‘gourmets’ qui déterminent les vins qualifiés à la marque ‘Dijon’ (vins du Dijonnais).
• Durant la période couvrant la fin du 16e et le 17e siècle, le ‘vin issu de raisins à peaux rouges’ connaît, partout, une métamorphose considérable. Il était soumis auparavant à une très courte cuvaison et un élevage sommaire; il sera dorénavant élaboré avec davantage de couleur et de corps, au moyen d’une extraction tangible et un élevage allongé. C’est aussi le moment correspondant à l’industrialisation de la bouteille, contenant qui confère alors une meilleure capacité de vieillissement au vin.
En Bourgogne, la pratique de la vente du vin, qui avait cours systématiquement en novembre suivant sa réalisation, est décalée progressivement jusqu’en févier. Du coup, ce sont des vins plus aboutis et, partant, plus caractérisés qui sont commercialisés. Concurremment, le jugement d’appréciation des vins subit une évolution graduelle et irréversible. Du critère d’équivalence (voir le paragraphe suivant), la transition du jugement s’opère graduellement en faveur, dans un premier temps, d’une catégorisation géographique accrue (vers 1670-1675), puis dans un deuxième temps, d’une catégorisation de crus (à compter approximativement de 1680). À titre illustratif, avant le 17e siècle, sur le marché important de Dijon, l’appréciation des vins du Dijonnais obéissait essentiellement à un barème de distance du vignoble d’origine par rapport au cœur de Dijon. Le degré de notoriété d’un vin, et de façon corollaire son prix, grandissait par bandes concentriques en se rapprochant de Dijon même; la frange la plus rapprochée de Dijon étant bien entendu la plus prisée. Bref, le prestige de Dijon se reflétait symboliquement sur le vignoble lui étant immédiatement attenant. Ainsi, au milieu au 16e siècle, Gevrey-Chambertin étant en retrait de Dijon, les vins de ce finage étaient associés à la dernière strate de prix, la moins chère. Cent ans plus tard, les Chambertin occupaient le haut de la pyramide, tandis que ceux de la commune même de Gevrey-Chambertin avaient obtenu une appréciation sensible.
Le vignoble dijonnais se situait sur les coteaux entourant la cité de Dijon et il couvrait aussi les finages des AOC actuelles de Marsannay, Fixin et Gevrey-Chambertin. Le Dijonnais a occupé une place importante dans l’histoire vinicole de la Bourgogne. La partie de la Côte dijonnaise entourant la ville a été substituée par l’occupation urbaine de Dijon à la suite de la crise phylloxérique de la fin du 19e siècle.
• L’aristocratie, surtout des parlementaires et des nobles de robe (droit et finance), deviennent de plus en plus des exploitants de vignes dans les meilleurs terroirs. Impliqués, les nobles font fièrement la mise en valeur et la promotion de leur vignoble. Le phénomène contribue significativement à la différenciation des climats.
• C’est au 17e et, surtout au 18e siècle que les vins sont graduellement hiérarchisés, que les appellations sont en germination. Outre les vins de quelques crus phares qui sont nommés individuellement, les vins sont d’abord désignés selon leur commune d’origine au tournant du 17e au 18e siècles; en fait sous le nom de villages, des ‘porte-drapeaux’; pas tous les villages, notamment Morey-Saint-Denis n’était pas une dénomination ‘porte-drapeau’. Puis la distinction des lieux-dits, particulièrement des futurs Grands Crus, s’établit peu à partir de 1760-1770.
• Les négociants, devenus les principaux intervenants du commerce à partir de 1740-1750, ont aussi favorisé la différenciation des climats comme moyen de distinction et subtilité de marketing. Le commerce devient libre et autonome à compter décret de 1776, via notamment la suppression des officiers communaux de contrôle et l’édit de Louis XVI promulguant la libre circulation commerciale du vin sur toute l’étendue du royaume. − Auparavant, des droits et des contraintes étaient appliqués à l’entrée des villes et au passage de bornes régionales et autres .
• La ‘parcellisation’ du vignoble devient un phénomène culturel au 18e siècle.

 


19e siècle / exit le clergé et la noblesse, apparition des dénominations référentielles, premiers classements et ravage par le phylloxera

La vente des ‘Biens publics’ (1789-1793) conséquente de la Révolution, comporte la disposition par encan d’un large patrimoine de parcelles réputées ayant été confisquées à la noblesse et au clergé: 1361 ha de vignes en lieux réputés. Les acquéreurs sont surtout des bourgeois parisiens et aussi des maisons de négociants. Des petits lots sont acquis par des paysans.
• Le commerce du négoce exploite des marques et surtout des dénominations référentielles. Les principales dénominations référentielles utilisées par le négoce sont les noms des principales communes et des climats réputés. À titre illustratif, les négociants élaborent et commercialisent des ‘Pommard’, typés, c’est à dire étant associés aux références organoleptiques communément reconnues pour ‘Pommard’; idem pour le ‘Gevrey-Chambertin’ et ainsi de suite. Si les dénominations utilisées par le négoce s’appuient sur le principe de l’équivalence, la conception des vins est toutefois entièrement libre: assemblages fréquents de diverses provenances, adjonctions diverses, etc…
• L’accès à la propriété de vignes s’accroit pour les paysans. L’expansion du vignoble, incluant dans la plaine prolongeant La Côte, est considérable durant ce siècle. Le prolifique et rentable gamay succède au pinot noir en maints endroits de La Côte. Il n’y a pas de cadre légal.
• La promulgation en 1804 du Code Napoléon, le ‘code civil’, instaure lors des successions familiales, la règle de partage entre tous les enfants, et non plus strictement à l’ainé. La propriété du vignoble se subdivisera graduellement par la suite.

 

Toujours est-il …

… Que les négociants sont pris un jour à leur propre jeu.

Ils ont participé activement à la création des dénominations au 19e siècle (voir le paragraphe précédent). Au début du 20e siècle, s’ils ne s’opposent pas à la notion ‘d’appellations’ comprise dans le concept des Appellations d’Origines, les AO, préconisées par la classe des viticulteurs, ils sont toutefois fortement opposés au principe de rigueur de provenance des raisins comprise dans la notion ‘d’origine’. Ils veulent continuer à produire selon le principe de l’équivalence, c’est-à-dire des Pommard répondant à l’idée consensuelle du Pommard sans contrainte de provenance des raisins. Hum!

• Tout amateur immodéré de Bourgogne doit impérativement connaître le nom de Jules Lavalle (1820-1880). Entre autres directeur du jardin botanique de Dijon, il est influent dans les cercles intellectuels de Dijon du milieu du 19e siècle. Il écrit en 1855 une monographie sur la viticulture de La Côte qui contient la première classification exhaustive et rigoureuse des climats, par finage. L’œuvre est majeure, référentielle. À la suite, exemple partiel de couverture, commune de Vosne-Romanée, par Jules Lavalle.

Cliquer sur l’illustration de droite pour la grossir.

• Une deuxième hiérarchisation maitresse des climats de la Côte d’Or est réalisée en 1860. Le Comité d’Agriculture et de Viticulture de l’arrondissement de Beaune produit une classification, cartographiée en 1861, selon un canevas en trois classes qualitatives. L’illustration à la suite porte sur la classification du finage de Vosne-Romanée. (Voir les segments du thème ‘Classements historiques’ pour consulter les cartes des autres finages.)

Toujours est-il …
… Que la restauration du vignoble, après sa destruction occasionnée par le phylloxera, éliminera totalement le mode ancestral de culture de la vigne en foule, par provignage. Le vignoble est dorénavant planté en rangées, la vigne est taillée selon la méthode Guyot et palissée. Le rendement en est multiplié et la gestion du vignoble en est facilitée. Un demi siècle plus tard, l’arrivée du tracteur changera une nouvelle fois la donne dans l’exploitation des vignobles.

→ 20e siècle / les Lois sur les Appellations d’Origine

• Le phylloxera ayant totalement ravagé le vignoble de La Côte à la fin du 19e siècle, les négociants en vins s’approvisionnent en raisins extérieurs de la région, entre autres d’Algérie. Ils développent aussi un ‘savoir-faire’ en production de vins factices. Ils poursuivront ces pratiques après la reconstruction du vignoble au début du 20e siècle. Un peu partout en France, les viticulteurs peinent alors à trouver des acquéreurs pour leurs récoltes. Le milieu viticole obtiendra de la République des Lois pour contrer ce qui est considéré comme étant de la fraude réalisée par les négociants. Des Lois successives entre 1905 et 1934 auront pour aboutissement la mise en place des Appellations d’Origine Contrôlée, les AOC.
• Des syndicats de défense de viticulteurs se créent sur tout territoire viticole, même exigu comme ceux des Grands Crus actuels, jugé susceptible par ses adhérents d’obtenir une appellation.
• Une première Loi en 1905, la ‘Loi sur la répression des fraudes et des falsifications de produits ou services’, porte sur la fixation de ‘Délimitations Administratives‘. Elle s’avère infructueuse parce que l’échelle choisie, les juridictions administratives, est une source de conflits importants.
• En 1919 la deuxième Loi, sur la ‘Protection des Appellations d’Origine (AO)‘, fait appel à l’appareil judiciaire pour fixer les AO. Chacun de leur côté, les syndicats de défense, de territoires respectifs, s’opposent alors en Justice à des tiers jugés usurpateurs de dénominations. À titre d’exemple, le Syndicat de Défense (des producteurs) de Gevrey-Chambertin s’oppose par voie judiciaire à l’emploi de la dénomination ‘Gevrey-Chambertin’ pour les vins produits issus ou produits sur le finage de Morey-St-Denis. Dans ce dernier cas, comme dans les autres, la Justice s’appuie sur ‘les usages locaux, loyaux et constants’ pour examiner les causes et fixer du coup les AO dans leur jugement. La première AO Côte d’Orienne déterminée par un jugement est ‘Montrachet’ en 1921.
• La Loi Capus de 1927 introduit la notion d’encépagement dans les AO.
• Finalement la ‘Loi des Appellations d’Origine Contrôlée (AOC) est promulguée le 30 juillet 1935. Celle-ci ajoute les paramètres de production afférents aux AOC (rendements, taux d’alcool, etc.) et crée le Comité National des Appellations Contrôlées, organisme décideur doté de la personnalité civile pour décréter des AOC. Morey-St-Denis est la première AOC bourguignonne à être formalisée en décembre 1936.
• Les viticulteurs impliqués activement au sein des organismes de représentation dans la dynamique de mise en place des AOC sont boudés, sinon ostracisés, par le négoce. Encouragés par des importateurs américains, ceux-ci entreprennent la mise en bouteille à la propriété durant les années 1940.
• En 1943, un décret instaure la nouvelle classe des Premiers Crus. Initialement valable pour un millésime, cette classe est maintenue définitivement.
• Au début des années 1970, le négoce couvre 95% de la commercialisation du vin de Bourgogne. Ce pourcentage diminue progressivement depuis.