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Saint-Joseph: géographie/géo-pédologie

Ce compte rendu découle principalement du
‘Rapport général – Étude géo-pédologique AOC Saint-Joseph’ réalisé en 2013 par ‘Sigales‘, société d’études de sols et de terroirs

CONTENU

1⇒ Aspects géographiques essentiels (aire de l’appellation et son milieu)
1.A→ Succession de vignobles sur 26 communes
1.B→ Position en bordure du Massif Central
1.C→ Esquisse des expositions du vignoble
1.D→ Physionomie du vignoble ou deux contextes géographiques
2⇒ Géologie – aperçu général

2.A→ Cartographie générale
2.B→ Principales observations
2.C→ Lexique pratique
3⇒ Close up géologique par secteurs (séquence du Nord au Sud)
3.A→ Extrémité septentrionale / Secteur Chavanay

3.B→ Long segment central / Saint-Pierre-de-Boeuf à Vion
3.C→ Secteur historique / Saint-Jean-de-Muzols à Glun
3.D→ Extrémité méridionale / Châteaubourg à Guilherand-Granges
→ Bibliographie

1 → Aspects géographiques essentiels (aire de l’appellation et son milieu)

1.A → Succession de vignobles sur 26 communes

Vignoble allongé, en ‘guirlande’ (terme imagé utilisé dans ‘Étude géopédologique de Saint-Joseph’, réalisée en 2014 par la société ‘Sigales‘), sur le rebord oriental du Massif Central, l’aire de Saint-Joseph traverse consécutivement, linéairement, 23 communes du département de l’Ardèche et trois du département de la Loire (Chavanay, Malleval et Saint-Pierre de Bœuf), sur une distance de ±55 kilomètres à vol d’oiseau.

Illustration A. La ‘guirlande’ des 26 communes de l’aire de Saint-Joseph, riveraines du Rhône, ou l’avoisinant pour quelques unes. Une géographie unique dans la mosaïque des appellations du vignoble de France.


1.B → Position en bordure du Massif Central

Illustrations B. (Cliquez sur les illustrations pour les grossir.) Le jeu des altitudes des environs de l’aire de Saint-Joseph. Les chiffres de la légende indiquent les niveaux d’altitudes correspondant aux couleurs.
Le cortège des 26 communes de l’aire de Saint-Joseph longe le Rhône. Le vignoble est accroché à la bordure même du Massif Central.

Illustration de gauche: la moitié septentrionale de l’aire, de Chavanay au Nord à Saras, qui est relativement au milieu de l’aire. Un plateau collineux,  une pénéplaine (teinté en rose / créneau altitudinal de ±350 à ±400 mètres), surmonte à l’Ouest le versant de vignes (en jaune foncé et orange pâle / créneau altitudinal de ±140 à ±300 mètres). Les premiers monts du Velay apparaissent à l’Ouest en couleur bleutée.
Illustration de droite: la moitié méridionale de l’aire de l’appellation, entre Sarras et la limite Sud à Guiherand-Granges. La montagne (couleur bleutée) s’élève plus promptement à l’Ouest du versant de vignes teinté en rose.


1.C → Esquisse des expositions du vignoble

Illustrations C. Selon un segment entre Chavanay et Charnas , de ±7 km, l’illustration de droite fournit un aperçu du jeu des expositions des environs (non pas de l’aire homologuée) de Saint-Joseph. L‘illustration de gauche ne retient que les parties colonisées en vignes, celles-ci étant exposées dans le spectre propice de l’Est au Sud-Est.
Les multiples vallées et combes disséquant la lisière Ouest du Massif Central crée ces jeux d’expositions.

En superposant les parties exposées adéquatement pour la vigne à celles inscrites dans le créneau altitudinal optimal, entre ±140 m à ±300 mètres, l’aire formelle de Saint-Joseph se restreint ainsi à des grappes éparses, en bordure du Massif Central.


1.D → Physionomie du vignoble ou deux principaux contextes géographiques

Le vignoble, aménagé en terrasses en maints endroits en raison de pentes abruptes, présente le schéma général suivant:

Dans la partie septentrionale, entre Chavanay et Saint-Pierre-de-Muzols, les flancs de vignes, sont exposés au Sud-Est (dicton local: “Pour que le vin soit bon, la vigne doit voir le fleuve (ou ses affluents).”), aux débouchés de multiples vallées et combes sur la vallée principale du Rhône (voir l’illustration E ci-bas); nommément les vallées de la Valensize (débouché sur le Rhône à Chavanay), du Batalon (débouché à Malleval), de l’Ecouta (débouché à Saint-Désirat), du Torrenson (débouché à Andance), de la Canse (débouché à Sarras), de l’Ay (débouché à Ozon) et du Doux (débouché à Tournon-sur-Rhône).
Les coteaux de vignes de cette partie au Nord sont prolongés immédiatement à l’Ouest par un quasi plateau, une pénéplaine, dont l’altitude se situe globalement entre 350 et 400 mètres. Le socle y est formé en bonne de granite du Velay.

Dans la partie méridionale, de Tournon à Guilherand-Granges, l’organisation diffère quelque peu, particulièrement dans l’axe Tournon-Mauves-Glun qui est le berceau de l’appellation. Bien qu’encore tailladé, le versant de vignes est davantage linéaire et longitudinal au Rhône, exposé de l’Est au Sud-Est (voir l’illustration F ci-bas). La montagne qui prolonge le vignoble à l’Ouest gagne promptement de l’altitude. Le socle de cette partie est surtout formé de granite de Tournon.

Illustration D. Le vignoble (moitié méridionale de l’aire sur l’illustration) de Saint-Joseph est coloré en vert. Cette illustration, produite schématiquement à partir de Google Earth, offre un aperçu de la physionomie de l’appellation. Il s’agit d’un tronçon entre Guilherand-Granges au Sud (face à Valence, sur l’autre rive du Rhône: présence du micro secteur des Royes, inscrit dans l’aire de Saint-Joseph, représenté par une minuscule tâche verte sous la mention Saint-Péray), et les abords de Saint-Désirat, grosso modo à mi-chemin de l’aire longiligne de Saint-Joseph.
L’aire de Cornas, une coupure dans l’axe de Saint-Joseph, est délimitée par un trait rouge. Sur l’autre rive du Rhône, l’aire de Crozes-Hermitage est colorée en bleu; celle de Hermitage en violet.

En résumé, le vignoble de Saint-Joseph occupe, d’une part dans la partie septentrionale, des flancs les mieux exposés, dans un spectre du Sud-Est au Sud, de multiples débouchés de vallées et combes sur la vallée du Rhône; et d’autre part dans la partie méridionale, des sections du rebord tourmenté du Massif Central qui sont longitudinales au Rhône, exposées aussi aussi au Sud-Est.

Illustrations E et F. À gauche, le vignoble des alentours de Arnas témoigne de la géographie du vignoble du secteur septentrional de l’aire de Saint-Joseph: les vignes sont en bonne partie situées sur les flancs exposés du Sud-Est au Sud des nombreuses vallées et combes s’ouvrant sur la grande vallée du Rhône.
À droite, le vignoble de l’axe Tournon-Mauves, le coeur du secteur méridional, est plutôt longitudinal au Rhône. Étant plus au Sud, ce secteur bénéficie d’une température un peu plus chaude; les vignerons conçoivent que pour chaque tranche de 100 kilomètres vers le Sud correspond un gain moyen de un degré.
En guise d’introduction au volet sur la géologie, le secteur septentrional s’appuie en bonne partie sur un socle de granite du Velay, tandis que le méridional s’appuie sur un socle de granite de Tournon.


2 ⇒ Géologie – aperçu général

2.A → Cartographie générale

Une série de cartes sectorielles à une plus grande échelle (1/25 000) figure plus bas.


2.B → Principales observations

Les types de roches-mères (ou matériaux parentaux) sur l’aire de Saint-Joseph:
• Une proportion de 82% de l’aire de Saint-Joseph comporte des sols reposant directement sur des socles de roches cristallines: granite, gneiss, migmatite (‘gneiss granitisé’). Ces roches sont composées de trois minéraux − quartz, feldspath et mica − les deux derniers étant particulièrement altérables, particulièrement fragilisés par les variations de température et d’humidité/eau; leur altération induit notamment de l’argile.
• Les autres types de formation couvrant mutuellement environ 18% sont:
√ des loess (ère quaternaire), soit une couverture de limons, sans éléments grossiers, transportés par les vents et répartis de façon éparse sur environ 230 hectares, correspondant à ±12% de l’aire, dont une présence assez significative sur le versant de Mauves;
√ des formations calcaires du jurassique, situées tout au bas de l’aire, à Guilherand-Granges; et du Trias, localisées bien discrètement à Châteaubourg, immédiatement au Nord de Cornas;
√ des alluvions, sur environ trois hectares, soit des galets roulés et émoussés, charriées par le Rhône à une époque où son niveau était nettement plus élevé;
colluvions et alluvions de bas de pente, sur une centaine d’hectares, lesquelles sont constituées de matériaux granitiques qui ont été transportés depuis les coteaux par l’érosion gravitaire (colluvionnement) ou hydrique (alluvionnement), lesquelles se sont agglomérées en pied de coteaux.

Deux grands contextes physiographiques (rappel de 1.D):

Dans la moitié septentrionale de l’aire, les vignes sont en large partie accrochées aux flancs, exposés surtout au Sud-Est, de multiples débouchés de vallées et combes sur la vallée principale du Rhône. Le vignoble de cette partie est prolongé à l’Ouest par un quasi plateau, une pénéplaine, à 350/400 mètres d’altitude. Le socle de ce secteur est formé de granite du Velay.

Dans la moitié méridionale de l’aire, l’organisation du relief diffère quelque peu, particulièrement dans le segment Tournon-Mauves-Glun, le berceau de l’appellation. Bien qu’accidenté, le versant de vignes y est davantage linéaire, longitudinal à l’axe du Rhône. La montagne qui prolonge le vignoble à l’Ouest gagne plus promptement de l’altitude. Le socle de ce secteur est formé de granite de Tournon.

Quatre secteurs géologiques:
À l’extrémité Nord, sur la commune de Chavanay, des filons de granite clairs et fins comportant aussi bien des micas noirs (granite à biotite) que des micas blancs (granite à muscovite) déterminent un sous-sol singulier à ce secteur.

• Le sous-sol d’une longue lisière au centre de l’aire, de Saint-Pierre-de-Boeuf à Vion, représentant la chute du plateau à l’Ouest, est constitué de granite du Velay, lequel représente le substrat rocheux le plus présent sur l’aire de l’appellation, et de migmatites claires (‘l’enveloppe’ du granite muté en migmatite par métamorphisme). Le granite du Velay est clair, pauvre en biotite (mica noir), avec des cristaux verdâtre de cordiérite (pierre fine).

Entre Saint-Jean de Muzols et Glun, soit le berceau de l’appellation puisque la première aire de l’appellation n’a circonscrit que ce secteur en 1956, le granite de Tournon est dominant, un granite à gros grain clair.

À l’extrémité Sud, à Châteaubourg et à Guilherand-Granges, sur un très court segment de l’aire de Saint-Joseph, des formations sédimentaires y sont prédominantes. Il s’agit de situations géologiques respectivement bien locales, ponctuelles, puisque l’aire de Cornas qui est placée entre ces deux endroits a un sous-sol qui très majoritairement formé de granite de Tournon.


2.D → Lexique pratique

Alluvion: dépôt de matériaux transportés par un cours d’eau et déposés en un lieu en aval.
Amphibolites
: roche sombre verte, peu quartzeuse (dépourvue de quartz par endroits) et induisant des sols singuliers, plus limoneux-sableux fins en surface. Son altération produit plus d’argile en profondeur que le granite classique.
Arène granitique
: état du granite entièrement altéré, soit le sol en surface. À ne pas confondre avec ‘saprolite’ qui est le premier stade d’altération du granite (voir saprolite ou gore).
Biotite
: mica noir.
Colluvion
: dépôt résultant de l’érosion gravitaire.
Gneiss (illustration à la suite)
: issu de la transformation par des facteurs physico-chimiques d’une roche en une autre nature de roche, alors du type métamorphique. La minéralogie du gneiss est assez identique à celle du granite: quartz, feldspath et  micas. Les minéraux sont cependant organisés en litages (débit de la roche en couches successives; synonymes: foliation ou schistosité).
Gore
ou saprolite (illustration à la suite): horizon d’épaisseur de ±60 cm, bien que variable, intégré entre l’horizon de sol meuble en surface (arène granitique) et le substrat rocheux. Le saprolite représente le stade intermédiaire d’altération du granite. La roche se désolidarise, se transforme, mais conserve une cohésion interne (les grains conservent leur arrangement primitif). La couleur devient rouille.
Granite (illustration à la suite)
: Roche du type ignée (ou magmatiques) constituant la majeure partie des roches continentales et océaniques. Il se forme au sein de la croûte terrestre quand un magma se refroidit et se solidifie, se cristallise (roche cristalline). Il se compose de trois minéraux: quartz, feldspath et micas (blanc ou noir).
Granite à biotite: le mica noir se nomme biotite; le mica étant un des trois minéraux composant le granite, avec le quartz et le feldspath. Le granite à biotite se présente en filons rectilignes constituant des remontées de magma. Reconnaissable par leur paillettes argentées. S’observe surtout à Chavanay en limite Nord de l’appellation.
Granite à muscovite: granite fin et clair comportant des micas blancs (muscovite).
Granite de Tournon: granite clair à gros cristaux qui se constate dans la partie méridionale de l’aire de Saint-Joseph, entre Tournon et Cornas. Sa composition minéralogique: ± un tiers de quartz, ± un tiers d’orthose (un des principaux types de feldspath), et ± un tiers d’oligoclase (autre type de feldspath, dit plagioclase) et biotite (mica noir).
Granite du Velay: ce granite est rattaché au complexe dit de Velay
(monts du Velay) au sein du Massif central, s’inscrivant entre Vienne (Isère), Privas (Ardèche), Le Puy-en-Velay (Haute-Loire) et Monbrison (Loire). De teinte claire, plutôt pauvre en biotite, avec des cristaux verdâtre de cordiérite.
Migmatite (illustration à la suite): parfois appelé ‘gneiss granitisé’, roche au métamorphisme avancé qui s’apparente à des gneiss sombres intégrant des veines blanches granitiques. Gneiss et migmatite se différencient du granite non pas par la composition minéralogique mais par le débit, en couches successives, et l’altération (modifications des propriétés physico-chimiques des minéraux par les agents atmosphériques). Peu quartzeuse, en résulte des sols distinctif.
Orthogneiss: gneiss clair riche en quartz et feldspath, mais pauvre en mica noir. Plus massive, brute et moins altérable que le gneiss et le micaschiste sombre.
Saprolite (illustration à la suite)
: Le saprolite représente le stade intermédiare d’altération du granite. Il forme un horizon logé entre l’horizon de sol meuble en surface (arène granitique) et le substrat rocheux. Le granite s’est alors désolidarisé, transformé (de l’argile s’est notamment formé), mais conservant une cohésion interne (les grains conservent leur arrangement primitif). La couleur devient rouille.

À gauche, des morceaux de granite.Si dur soit le granite, il est composé de trois minéraux − quartz, feldspath et mica − les deux derniers étant particulièrement fragilisés, altérés, par les variations de température et l’humidité.

Au haut à droite, de couleur plus rouille, une masse de saprolite tranchée en deux. Le saprolite est stade intermédiaire d’altération du granite.  L’altération, la transformation des minéraux en d’autres minéraux, du granite dur en saprolite, est un phénomène considérablement lent: l’altération de 1 à 10 cm requiert ±10 000 ans. L’épaisseur de l’horizon de saprolite est en moyenne 40 à 60 cm sur l’aire de Saint-Joseph. Le saprolite emmagasine l’eau tout en évacuant l’excès.

Au bas à droite, une poignée d’arène granitique, le stade de désagrégation final du granite, constituant l’horizon de sol en surface.

Deux exemples de granite.
À gauche: Gneiss/micaschiste à Ozon dans l’aire de Saint-Joseph.
À droite: Migmatite du Massif Central

 


3 ⇒ Close up géologique par secteurs (séquence du Nord au Sud)

3-A→ Géologie – extrémité septentrionale/secteur de Chavanay

Le vignoble de Chavanay, inscrit tant dans les aires de Condrieu et Saint-Joseph.
Des granites à deux micas, des granites à muscovite et des granites à biotites, sont observés seulement à cet endroit de l’aire de Saint-Joseph.

Le granite à muscovite singularise ce secteur de Saint-Joseph.

3-B→ Géologie – long segment central

Sur la longue lisière centrale de l’aire de Saint-Joseph, de Saint-Pierre-de-Boeuf à Vion, représentant le déclin (le versant) de la pénéplaine située à l’Ouest vers la vallée du Rhône  le sous-sol est très majoritairement formé de granite du Velay, la formation la plus typique de l’appellation. Ce granite est rattaché au complexe dit de Velay (monts du Velay) au sein du Massif central, lequel est délimité par Vienne (Isère), Privas (Ardèche), Le Puy-en-Velay (Haute-Loire) et Monbrison (Loire). Il s’agit d’un granite clair, pauvre en biotite (mica noir), avec des cristaux verdâtre de cordiérite (pierre fine).
On observe également des migmatites (gneiss sombre) et des amphibolites dans les environs de Sarras. Ozon, Arras et Vion.
À l’ouest du versant de vignes, la pénéplaine, moins hospitalière à la vigne qualitative, est dans le créneau altitudinal de ±300 à 350 mètres.


3-C→ Géologie – St-Jean-de-Muzol à Mauves / secteur historique

Entre Saint-Jean-de-Muzols et Glun, (en fait jusqu’à Cornas), représentant le berceau de l’appellation puisque la première aire définie en 1956, c’est le granite de Tournon qui est dominant, un granite gris à gros grain.
Le vignoble de Mauves se singularise par une présence significative de loess.


4-D→ Géologie – extrémité méridionale: Châteaubourg à Guilherand-Granges

Le granite de Tournon y alterne avec des formations sédimentaires, de calcaires (voir ‘roches sédimentaires dans la légende ci-haut).

→ Bibliographie

Consultation principale:
‘Rapport général – Étude géo-pédologique AOC Saint-Joseph’ réalisé en 2013 par ‘Sigales‘, société d’études de sols et de terroirs

Voir aussi ‘Bibliographie: Région Rhône-Nord