→ David Croix (Domaine des Croix)
David Croix au Domaine des Croix (octobre 2015)
Bien qu’il soit originaire de Montlouis en Touraine, David Croix n’a pas de racines vigneronnes. Son père avait et a encore une cave à vins d’amateurs, surtout pour les moments de convivialité. Il a obtenu son diplôme d’œnologie à l’Université de Dijon en 2001. De là, il fit un bond vers Beaune pour entreprendre son parcours de vigneron chez le négociant-éleveur Camille Giroud, qu’il dirigea jusqu’en 2016. De plus, depuis 2005 il est aux commandes du Domaine des Croix, qui est l’ancien Domaine Roger Duchet, aussi basé à Beaune. Il a réalisé des restructurations chez CG et au Domaine des Croix.
Pratique informelle de la culture biologique depuis 2008 au Domaine des Croix. Taille des vignes réalisée selon le système Guyot-Poussard (favorise le flux de sève). Gestion du vignoble en vue d’obtenir des rendements de 30/35 hl/ha pour les Premiers Crus (Aloxe-Corton Les Boutières / Beaune: Les Grèves, Les Bressandes, Les Cents Vignes et Pertuisots) et ±25 hl/ha pour les Corton (Vigne au Saint et Les Grèves). Vendanges manuelles. Approche au chai selon “quelques grandes lignes, sans artifices de vinification, sans livre de recettes”. Pré-fermentaire à froid effectuée surtout pour un motif de ‘logistique’ (surtout gérer les vendanges). Vinification partielle en vendanges entières selon le cru et le millésime (“pour la fraîcheur, le floral et la tension apportés”). Exclusion de levure commerciale au Domaine des Croix. Mix de remontage (“pour élancer les vins“) et de pigeages (“apport de plénitude et chair”). Saupoudrage de sucre en fin de cuvaison si requis pour allonger les vinifications. Ajout partiel du vin de presse. Élevage de 14/18 mois en fûts, dont une proportion de 15/20% en pièces neuves. David Croix est mobilisé par l’emploi minimaliste du souffre, emploi dicté par la dégustation suivant la malo seulement. Deux passage en cuves sur une période de deux à trois mois pour soustraire les lies avant les mises en bouteilles.
Doué, il parvient à apporter à ses vins, en plus de l’équilibre, l’attribut qu’il veut leur conférer le plus, de la texture. Jeunes, les vins ont un trait boisé charmeur qui participe avantageusement au schéma aromatique des vins. Les corps sont volumineux sans lourdeur. Les minéralités sont affirmées et les textures toujours engageantes. Nul doute que David et Geoffroy Choppin de Janvry seraient des vignerons davantage médiatisés s’ils devaient être plutôt actifs sur des appellations prestigieuses de la Côte de Nuits.
→ Geoffroy Choppin de Janvry (Domaine Albert Morot)
Le Domaine Albert Morot est établi au Château de la Creusotte (non identifié comme tel) à la sortie de Beaune sur la route de Bouze-les-Beaune. Albert Morot fut un négociant beaunois du 19e siècle. Les vignes possédées par le Domaine furent achetées aux propriétés de la Romanée-Conti et de la Pousse d’Or en 1894. Le vignoble alors acquis est toujours entre les mains du domaine: climats Les Teurons, Les Grèves, Les Toussaints, Les Bressandes, Les Cents Vignes, Les Marconnets et un Monopole hors de Beaune, celui de La Batelière à Savigny-les-Beaune. Avant Geoffroy Choppin de Janvry, vigneron discret et efficace, le domaine était dirigé par sa tante Françoise Choppin, une dame au fort caractère, dont les vins jouissaient d’une très bonne réputation il y a vingt ans. Albert Morot était la seule propriété vigneronne du finage de Beaune citée en 1996 par Remington Norman dans ‘The Great Domaines of Burgundy’ (première édition): “A charming lady and efficient lady now in her sixties (encore bien vivante en 2015) having a deep feeling for quality.”
Les vins du Domaine Albert Morot ont belle presse encore aujourd’hui. Le vignoble, comprenant entres autres 6 ha de Beaune Premiers Crus, est (2014) en conversion vers la culture biologique depuis quelques années, pour “faire revivre le sol”. Arrêt des labours après la floraison afin, entre autres, que l’enherbement qui s’ensuit pompe l’eau des pluies, cela au détriment de vignes car le but est de favoriser l’épanouissement du fruit à ce stade du cycle. Analyse des sols pour ajuster les amendements. Objectif de 35 hl/ha pour les Premiers Crus. Geoffroy attache une grande importance à la cueillette de raisins sains et très mûrs, à partir de vignes dont le matériel et l’âge sont variables.
Les vendanges sont réalisées promptement par un groupe considérable de 40 vendangeurs, dans un laps de temps le plus court possible, au juste moment. La cueillette est réalisée avec une discipline rigoureuse en procédant à un réel premier tri dans le vignoble. Les raisins subissent un autre tri, visuel, à l’arrivée au chai, puis un dernier tri des grumes sur table vibrante. Éraflage total. Macération à froid. Débourbage en cuve. Entonnage du jus pour la vinification sans levurage. Pigeages quotidiens et, si requis, quelques interventions ponctuelles de remontages pour stimuler l’action des levures et accentuer l’extraction. Chaptalisation au besoin pour atteindre un titre alcoométrique de 13o. Élevage de 14 mois sans soutirage, en fûts dont 30% à l’état neuf, en incorporant le vin de presse, puis en ne conservant subséquemment que les lies fines. Passage en cuves d’une dizaine de semaines avant les mises. Aucun pompage jusqu’au terme de l’élevage en fûts.
Les vins de Geoffroy Choppin de Janvry sont des pinots de style plutôt classique, dans le sens modèle du terme, c’est à dire dépouillés de tout effet de mode. Les plans aromatiques sont parfois en retenue à l’ouverture. Les corps sont fermes, dotés de grains fins. Les caractères des différents climats sont affirmés, nommément les belles textures procurées par différents terroirs, dont Les Toussaints, Les Bresssandes et Les Grèves. David Croix et Geoffroy seraient des vignerons davantage médiatisés s’ils devaient être plutôt actifs sur des appellations prestigieuses de la Côte de Nuits.
→ Jean-Claude Rateau (Domaine Jean-Claude Rateau)
Jean-Claude Rateau par une fin de matinée brumeuse sur le coteau beaunois (octobre 2015).
Les vins de Jean-Claude sont hors norme, comme l’homme. L’élevage de ceux-ci est réalisé certes en fûts, mais strictement en pièces de plusieurs vins (ayant servis sur plusieurs millésimes). Les vins sont ainsi exempts d’arômes et de saveurs boisées, à contre-courant du vin moderne. Jean-Claude Rateau est accueillant et authentique, mais de son personnage, ce sont davantage ses engagements pour ‘le respect du terroir’ qui lui valent notre admiration. Pionnier de l’agriculture biologique, il pratique cette discipline de gestion des sols pour mieux pérenniser des terroirs, qu’il s’estime honoré d’exploiter. Il est aussi le président du mouvement GEST (Groupement d’Étude et de Suivi de Terroirs) de Bourgogne, qui réunit des ‘vignerons passionnés par la compréhension et la préservation de leurs terroirs’.
Il croit que la connaissance de ses sols lui permet de mieux gérer les interventions. Il entrevoit de planter des cépages anciens (Pinot Beurot, Pinot blanc, etc.) pour exalter les expressions de terroirs. Ses plants, issus d’une variété de clones pour soustraire le risque de l’unicité, sont menés en Cordon Royat pour favoriser l’atteinte de l’objectif de 40 hl/ha, avec des grappes de petites baies. Il considère que le long apprivoisement de son matériel de vignes à la biodynamie procure des bénéfices tangibles. Entre autres, les raisins sont moins vulnérables à la dégradation résultant de problèmes cryptogamiques et aussi aptes à atteindre des maturités plus abouties. Le tri est effectué seulement à la vendange. Suivant une pré-fermentaire de 5/6 jours, la cuvaison sans levurage se déroule sur 25/28 jours, selon, en moyenne, deux pigeages par jour. Le sucrage, plutôt un saupoudrage (au plus l’équivalent de 0,3o), est employé pour soutenir la fermentation.
Les vins de Jean-Claude Rateau sont davantage destinés aux amateurs puristes, éclectiques. Ils nécessitent parfois un passage en carafe pour dissiper les effluves de réduction qui masquent parfois les parfums de fruits noirs à noyaux et les nobles amers. Les vins, dépouillés de saveurs boisées, ont de la franchise, de la structure et par dessus tout ils traduisent remarquablement leur terroir. Les minéralités des terroirs s’expriment comme il se doit par l’éclat des fraîcheurs, par les saines acidités.
Gilles de Courcel et Jean-Pierre Confuron (Maison Chanson)
Cette maison de négociant-éleveur est établie à Beaune dans un lieu historique, le Bastion de l’Oratoire (aussi nommé La Tour de Filles), une ancienne tour de défense des remparts de la ville qui sert actuellement de chai de stockage de bouteilles. Fondée en 1750, Chanson est présentement détenue par la société champenoise Bollinger. Jean-Pierre Confuron, est l’œnologue et directeur-technique de la maison. Il est aussi connu pour sa participation au réputé domaine Confuron-Cotédidot de Vosne-Romanée (Yves et Jean-Pierre Confuron ont été désignés ‘Vignerons de l’année 2014 par ‘La Revue du Vin de France’). Chanson détient une quarantaine d’hectares de vignes, localisés principalement en Côte de Beaune, dont une concentration sur le finage de Beaune.
Si la décision de Bollinger de confier la gestion de Chanson à des vignerons Côte d’Orien apparait perspicace, celle toutefois d’entériner que les vins soient vinifiés en grappes entières est courageuse. À notre avis, les vins produits en grappes entières sont davantage destinés à une clientèle d’amateurs avertis. Les 45 hectares de vignes détenues par Chanson même sont labourés, entretenus sans herbicides pour livrer des rendements très modérés en portant en moyenne six grappes par pied de vigne, puis vendangés à la main. La Maison met un soin particulier à transiter rapidement les récoltes au chai pour, via un procédé innovateur, refroidir très promptement les raisins dont “la dégradation débute dès la grappe coupée” (J.-P. Confuron). Le moût subit une macération à froid avant la vinification et le pigeage est traditionnel. Les élevages sont réalisés en fûts neufs dans une proportion moyenne de 25%. Les arômes usuels de la vinification en vendanges entières (notes florales, ronce, …) sont discrets. Plus que tout, les vins rouges de Chanson satisfont une norme qui doit être indéfectible dans les pinots noirs issus des meilleurs terroirs, ce sont des vins texturés. Des nombreuses maisons de négociants-éleveurs propriétaires de vignes sur le finage de Beaune, Chanson est un indiscutablement celle qui agit le plus concrètement pour mettre en valeur les Premiers Crus beaunois puisqu’elle y individualise des cuvées de huit climats: Monopole Les Fèves, Les Grèves, Les Bressandes, Les Marconnets, Les Teurons, Clos du Roi, Champs Pimont et Clos des Mouches.
Philippe Drouhin et Jérôme Faure Braque (Maison Joseph Drouhin)
Philippe Drouhin aux abords de la cabane dans les vignes du Clos des Mouches sous la propriété de Joseph Drouhin.
Jérôme Faure Braque est le sympathique directeur technique de la maison Drouhin. “C’est la finesse qui définit les vins Joseph Drouhin“. Si bien qu’il eut à passer un test de dégustation avant son embauche il y a déjà une dizaine d’années. Philippe Drouhin a la responsabilité de la viticulture au sein de la famille. Si grand soit-il, certainement deux mètres, nous pensons qu’il est aussi habité par une force tranquille. Il faut nécessairement être convaincu et convaincant pour amener père, frère et sœur à choisir la biodynamie en tant que moyen de conduite d’un patrimoine de 73 ha (en vignes propres), détenu par une société certes à caractère vigneron, mais aussi à vocation mercantile (négociant depuis quatre générations). La biodynamie est l’approche au vignoble de Joseph Drouhin depuis 1998, la culture bio ayant été pratiquée dès 1988. Bref, l’adoption de ces approches ne l’ont pas été par réflexe de modes. La maison Joseph Drouhin n’est d’ailleurs pas concernée par aucune mode. Nous avons goûté des vins des millésimes 1993, 2002 et 2010 et tous avaient la même trame fine, la même détente, le même soyeux et des couleurs peu prononcées à l’encontre, encore, des modes.
Les vendanges sont manuelles sur tous les crus. Les rouges sont éraflés. Les fermentations sans levurage. Les vins sont élevés sur lies, originales. Les soutirages sont minimaux, parfois exempts. Treize à quinze mois d’élevage pour les vins passés en fûts.
Joseph Drouhin a fondé sa société en 1880. Son fils Maurice adopta une politique axée sur la qualité, en marge alors des autres maison de négociants. Il constitua aussi un patrimoine de vignes, dont le Clos des Mouches qui impliqua le remembrement de 41 parcelles de huit propriétaires différents. Son neveu Robert (Maurice adopta Robert dont le père décéda prématurément) accroit le foncier en acquérant des parcelles sur des Grands Crus de la Côte de Nuits et aussi à Chablis où il est le premier ‘étranger’, arrivant de La Côte, à s’y implanter systématiquement avec des parcelles dans les GC Les Clos et Vaudésir et des Premiers Crus. Il est connu que tous les enfants de Robert sont impliqués dans l’entreprise: Philippe, Véronique, Laurent et Frédéric. La famille Drouhin est estimée dans le milieu vigneron.
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