mis en ligne: mars 2022
SÉQUENCE DES BLOCS:
A ⇒ Haute Antiquité
B ⇒ Deuxième et premier siècles avant notre ère
C ⇒ Premier siècle de notre ère
D ⇒ Deuxième segment du premier siècle jusqu’à la fin du troisième siècle
E ⇒ Quatrième siècle
F ⇒ Haut Moyen Âge / cinquième au dixième siècle
G ⇒ Moyen Âge Bas / onzième au quinzième siècle
H ⇒ 16e au 18e siècle
I ⇒ 19e siècle
J ⇒ 20e siècle
A ⇒ Haute Antiquité
Civilisation et vin
L’expansion de l’Islam − abstention de consommation d’alcool − en Asie Antérieure y soustrait la culture de la vigne destinée au vin, sur des sols pourtant propices. La propagation de la culture de vignobles vers le Nord en est ainsi favorisée. |
B ⇒ Deuxième et premier siècles avant notre ère
Contexte historique
Les romains étendent leur expansion géographique en Méditerranée à partir de -270. La Gaule couvre alors la France actuelle, une partie de la Belgique, ainsi qu’une partie de la Grande Bretagne. |
Société et vin
Pour les romains, la vigne et l’olivier sont indissociables. |
Vignoble
Une concordance de faits historiques permet de postuler que des vignobles furent cultivés en Rhône Nord avant à notre ère. Il est en effet plausible, qu’avant d’être soumis à l’autorité romaine, le peuple gaulois allobroge, ait exploité des vignes notamment en Isère aux derniers siècles avant J.C. |
C ⇒ Premier siècle de notre ère
Société et vin
Les pays de l’Europe du Nord constituent les principaux marchés du vin. Pour les romains, l’attraction de ces marchés justifie le projet d’expansion vinicole sur le territoire septentrional de la Gaule, soit les régions dont les cours d’eau s’écoule vers l’Atlantique et la Mer du Nord. Les cépages employés en zone méridionale par les romains ne permettent toutefois pas d’entrevoir l’expansion du vignoble davantage au Nord. |
Vignoble
En période de paix avec les conquérants romains, le peuple gaulois allobroge (Isère et Savoie) élabore ou trouve sur place à l’état lambrusque une variété, nommé en ce temps l’allobrogica, apte à étendre l’expansion du vignoble vers le Nord, sur des sols plus froids, soumis à d’éventuelles gelées. |
D ⇒ Deuxième segment du premier siècle jusqu’à la fin du troisième siècle
Contexte historique
La transition des cultes indigènes (païens) des gaulois en faveur de la religion chrétienne se fait par acculturation et implique la disparition des druides. À partir du 3e siècle, l’évangélisation est très active. La religion chrétienne devient celle de l’empire. |
Société et vin
Des cépages utilisés et des techniques développées en Rhône Nord et dans le Bordelais permettent d’entamer l’expansion vinicole en climat continental sur les franges septentrionales de la Gaule, particulièrement les régions dont le débit des cours d’eau se déverse vers l’Atlantique et la Mer du Nord. |
Vignoble
Il n’y a pas de certitude sur les origines du vignoble de la Côte d’Or. Aussi, c’est avec circonspection que le géographe-historien Roger Dion convient que sa première mise en valeur remonte approximativement au début du deuxième siècle. Depuis la métropole gallo-romaine Autun, le peuple gaulois des éduens aurait aménagé un vignoble, ‘Pagus Arebrignus’, sur les Côtes bourguignonnes ou ses proximités. En fait, à la faveur de leur excellente relation avec les romains, les éduens auraient bénéficié d’un privilège d’implantation en dépit de l’interdit de l’empereur Domitien. Les vignobles qualitatifs, pour l’époque il va sans dire, du bassin de la Seine nommément la région parisienne et la Picardie, sont nettement avantagés pour desservir par voie fluvial, de même que par des accès terrestres plus immédiats, les vigoureux marchés des pays de la mer du Nord. Ces vignobles ‘nordiques’ jouiront de la primauté commerciale sur ces marchés pendant près d’un millénaire. |
E ⇒ Quatrième siècle
Contexte historique
Tandis que l’Empire Romain vacille, des incursions barbares (afflux de peuples étrangers) font des ravages en des endroits la Gaule auparavant paisibles. L’Empire Romain s’adapte forcément, en intégrant progressivement des barbares dans leur organisation et leur armée. |
Société et vin
Les gallo-romains avaient une forme de vénération pour la vigne. La vigne était un art. Les métropoles alors créées, les civitates, avaient toutes des vignobles soignés qui attisaient l’orgueil de leur aristocratie. Au quatrième siècle, les grands personnages résidaient dans des lieux vinicoles ou en voie de le devenir. |
Vignoble
Le remarquable réseau fluvial de la France favorise le développement de la civilisation romaine et du commerce du vin. |
F ⇒ Haut Moyen Âge / cinquième au dixième siècle
Contexte historique De nombreuses tribus barbares entrent en Gaule à partir du début du 5e siècle. La gaule-romane est alors disloquée et une instabilité débute avec les ‘grandes invasions’. En résumé, voici la séquence de ‘guerres civiles’ post-empire qui fragmentent la Gaule: √ Premier épisode post-empire: le peuple asiatique wisigoth conquiert le Sud-Ouest de la Gaule, de l’Aquitaine jusqu’à la Loire. √ Deuxième épisode: venus de la Baltique, les Burgondes s’installent en maîtres sur le territoire couvrant la Bourgogne actuelle, la basse vallée du Rhône, les Cévennes et la Suisse occidentale. √ Troisième épisode: les Francs, de souche germanique, s’emparent du Nord de la Gaule, la Belgique et l’Artois. Ce sont les futurs conquérants de la Gaule. √ Quatrième épisode: les Alamans s’installent dans l’actuelle Alsace, la Suisse et le Sud de l’Allemagne. Les barbares assimilent les coutumes gallo-romaines. En corolaire, les gallo-romains acceptent les nouvelles autorités. Le troisième épisode est marquant: en 476, Clovis (466-511) un franc d’origine germanique, devient le premier monarque du royaume. Il a étendu progressivement son territoire aux détriments des autres tribus franques, des derniers romains, des Alamans et des Wisigoths. Il réalise systématiquement ses conquêtes, lesquelles seront accrues par ses successeurs. Aussi Clovis se convertit au catholicisme, ce qui détermine son acceptation par l’Église et les gallo-romains. Il préserve les structures et les institutions romaines, si bien qu’une collaboration réciproque s’établit avec l’Église. C’est la fin de la période Antique et le début du Moyen-Age. Clovis et ses descendants forment la dynastie ‘mérovingienne’. Ils agissent en possesseurs sur cinq territoires constituant le royaume jusqu’au milieu du 8e siècle: Neustrie (Gaule du nord-est), Bourgogne, Austrasie (France de l’Est) et Aquitaine. Le régime de vassalité est graduellement instauré. Dès le milieu du 7e siècle, la dynastie mérovingienne s ‘affaiblit d’elle-même; les derniers rois mérovingiens sont considérés fainéants. Il s’ensuit un long coup d’état sans violence qui mettra au pouvoir royal la dynastie subséquente, celle des carolingiens, jusqu’au 10e siècle. En bref, les lieutenants des rois mérovingiens se sont approprié le trône en quelque décennies, avec la complicité de l’Église au dernier épisode. De gain en gain réalisé, l’ancienne Gaule romaine sera rassemblée à nouveau sous l’autorité du premier roi carolingien, Pépin le Bref (714-768 / règne de 751-767). Le règne carolingien de Charlemagne (Charles 1er, dit ‘Le Grand’; 742-814 / roi des Francs à partir de 767) est un moment majeur de l’histoire de l’Occident. Conquérant tel ses prédécesseurs francs, il étend le royaume sur une superficie correspondant à deux fois celle de la France actuelle. Homme d’état magistral, il dirige son empire avec une habile autorité tout en favorisant notamment l’épanouissement des arts et des lettres. Ministre de Dieu, il intervient pour faire progresser et mieux organiser la chrétienté, sans tolérer l’ingérence de l’église. Le pape consacre sa dynastie en le désignant empereur. Il structure son empire en 300 comtés où il jette les bases de la vassalité. Les successeurs carolingiens de Charlemagne morcellent l’empire en cinq royaumes au cours des quarante années après sa mort. Ce morcellement est en quelque sorte l’amorce de l’Europe. Les duchés et les comtés, des territoires de vassalités, sont issus de ce partage. Durant le 10e siècle, les dynasties carolingiennes et capétiennes sont rivales et s’échangent la Couronne du royaume. Les capétiens émanent de la vassalité. Ce sont les descendants des comtes, des seigneurs, du régime (vassal) créé par Charlemagne; les seigneurs n’ayant de cesse à accroître leur puissance depuis leur émergence suscitée par Charlemagne pour contrôler son royaume.En 987, Hugues Capet devient le premier roi de la nouvelle dynastie royale des capétiens. À cette époque, la proximité entre les seigneurs et l’église est de règle. Notamment, des seigneurs possèdent des abbayes; certains d’eux sont des abbés (dirigeants des abbayes) laïques. Le vin produit par ces abbayes est alors partiellement subordonné aux besoins des seigneurs. Aussi la désignation du trône est sujette à l’élection des vassaux, les seigneurs. Les grandes décisions sont prises par un conseil royal et les évêques. Au changement de millénaire, le royaume est divisé en grandes unités territoriales; dont les duchés, entre autres de Bourgogne, d’Aquitaine, de Normandie, des marquisats et autres. Au Haut Moyen Age, la mosaïque des territoires du royaume est en constante mouvance, au gré de successions, d’alliances, de coalitions, de complicités, ou encore d’achats et bien entendu de guerres. C’est la France féodale. Seuls les historiens et les férus d’histoire s’y retrouvent. Les Vikings auront pénétré la Gaule au 8e siècle par ses voies fluviales de l’Atlantique, depuis la Mer du Nord, et effectué des raids et occupations en maints endroits. Les ambitions des vikings scandinaves sont stoppées en 911 par une forme de traité qui leur concède en quelque sorte un territoire qui deviendra la Normandie. Plus tard, Guillaume le Conquérant, duc de Normandie, sera indirectement l’initiateur de la fameuse dynastie des Plantagenets, qui guerroiera avec les Francs pendant quelques décennies. |
Société et vin
Guillaume Ier, Duc d’Aquitaine et d’Auvergne fonde l’abbaye de Cluny en 910 qu’il place sous l’autorité du pape pour la soustraire à celle des seigneurs; c’est l’amorce d’une réforme générale du monachisme. Vouée à la règle bénédictine, l’abbaye de Cluny deviendra en quelques décennies le pivot d’un ordre, clunisien, unique de prieurés et abbayes: 1450 établissements répartis sur une grande partie de l’Europe. Les abbayes entretiendront des vignobles pour leurs fonctions eucharistiques et d’hospitalité, aussi pour la consommation des moines. Le rôle des ordres monastiques dans le développement de la viticulture en Europe sera considérable, voire fondamental; particulièrement en France, jusqu’à la Révolution. |
Vignoble
Dans son œuvre historique, Grégoire de Tours (539-594) est le premier à signaler la présence de vignes en aval d’Orléans dans l’axe de la Loire. Pendant près de cinq siècles, instables, entre approximativement le 6e et le 12e siècle, il y a une rupture du commerce depuis l’Aquitaine vers l’archipel britannique par l’Atlantique. |
G ⇒ Moyen Âge Bas / onzième au quinzième siècle
Contexte historique en condensé
En l’An Mille débute en France une considérable évolution de l’agriculture et surtout de l’économie qui s’allongera sur trois siècles. La population augmente sensiblement et le phénomène d’urbanisation se développe puis s’organise, particulièrement à Paris; celle-ci et plusieurs agglomérations acquièrent alors leur autonomie politique par édit royal. |
Société et vin
Au 12e siècle, la région de La Rochelle − vignoble dont la taille est infiniment moindre aujourd’hui − s’approprie une importante position dans le commerce du vin. Son avancée résulte d’une vision stratégique réunissant les éléments suivants: vaste port de mer correspondant à l’avènement de bateaux de grand gabarit; vignoble destiné à satisfaire spécifiquement la demande de l’époque; production de vins doté d’un rapport qualité/prix avantageux − avantage comparatif attribuable à un climat plus propice à la vigne versus les vins des zones septentrionales −, et exploitation opportune du concept de bail à complant, la co-exploitation propriétaire(s) foncier(s) et vigneron(s). C’est durant ce siècle que les Cisterciens entreprennent le développement de leur ‘parc’ de vignobles qui comprendra maints endroits sur la côte bourguignonne. Le vignoble qui deviendra le Clos de Vougeot en est le premier jalon, magistral; voir ‘histoire du Clos de Vougeot‘. Les ordres de moines, les cisterciens au premier rang, donnent le premier véritable élan de développement viticole à la côte bourguignonne. Toujours au 12e siècle, le vignoble du diocèse d’Auxerre est en plein essor. Le clergé et la riche aristocratie plantent une vaste superficie qui recouvre, entre autres, les secteurs de Saint-Bris et Irancy. Les vins sont de haute qualité. La renommée de Chablis s’établit dans la foulée. Ce vignoble de la Basse-Bourgogne, bref l’Auxerrois et le Chablisien, nommé alors simplement ‘Bourgogne’, est favorisé par le transport via l’Yonne, affluent de la Seine, pour desservir Paris et les pays de la Mer du Nord. Au début du 13e, Beaune obtient une charte de commune, en vertu de sa capacité à l’autonomie politico-économique apportée par la nouvelle vigueur de l’industrie du vin. Le vignoble s’agrandit concurremment à sa notoriété. Au 14e siècle, le ‘vin de Beaune‘ (Côtes d’Or et chalonnaise) devient le plus prestigieux du royaume, la norme du vin de qualité. Fils du roi de France, le duc de Bourgogne Philippe le Hardi (1342-1404), est davantage qu’un puissant promoteur des vins de Beaune, il intervient directement pour en hausser la qualité: bannissement du gamay, initiation de travaux de sélection ayant généré le pinot noir, améliorations des techniques de viticulture, instauration de la mode du vin vermeil, alors un pinot peu cuvée et bu dans les 12 à 18 mois etc. Les ducs qui lui succèdent font aussi preuve de zèle et le vin de Beaune sera au sommet de la hiérarchie des vins de France jusqu’à la fin du 17e. Au sein du Royaume de France, le vin ‘de Beaune’ maintient sa suprématie durant trois siècles, environ de 1375 à 1660. La faveur du roi d’Angleterre et de sa cour vont aux vins de l’Ile de France, l’Anjou et La Rochelle. La solide loyauté de Bordeaux à l’égard de l’Angleterre lors de deux guerres du début du 13e siècle engendre toutefois une formidable ascension du commerce du vin bordelais en pays britanniques. La ‘récompense’ royale confère au vin bordelais la suprématie absolue à Londres vers le milieu du siècle. Cette nouvelle notoriété favorise l’expansion des exportations bordelaises sur d’autres marchés. Auparavant, le décalage d’appréciation du vin de Bordeaux découlait en bonne partie de la vogue en faveur des vins blancs et délicats; ces attributs n’étant pas ceux du cabernet. L’industrie du sel à Salins-les-Bains est l’assise économique du développement de la viticulture dans le Jura. Le vignoble prend une dimension commerciale vers la fin du 13e, autour des bourgs d’Arbois et Poligny. Vu sa proximité, la Suisse représente un débouché naturel. La viticulture champenoise est initiée vers le 12e ou 13e siècles. Jusqu’à la fin du 16e siècle, la production est assimilée aux ‘vin de France’, soit les vins du bassin parisien. La mention Champagne s’applique plutôt au milieu de la plaine céréalière environnante. La suprématie des vins de Bourgogne, du 14e au 17e, a toutefois un impact en Champagne: le long de l’axe de transit entre Beaune et les marchés du nord, Reims et Chalons-sur-Marne sont des étapes établies pour les commerçants. Ceux-ci y achètent des ‘Vins de France’ fins issus des vignobles situés à Hautvillers (face à Épernay), Ay et Vertus sur la Côte des Blancs. C’est une opportunité de débouché pour ces vins, alors tranquilles, blancs et rouges à la teinte vermeille comme les bourgognes. À partir du 14e siècle, le vignoble rhodanien détient un quasi-monopole − les trois quarts de l’approvisionnement − sur les celliers pontificaux, tant à Avignon qu’à Rome. Toutefois, avant l’édit de 1776 promulguant la libre circulation du vin dans le royaume de France, les marchés du Nord sont difficilement accessibles à ce vignoble en raison les droits de passage, de traversées territoriales, imposés par Lyon et d’autres territoires, nommément en Bourgogne, le long du parcours fluvial vers les marchés du Nord. Du 11e au 17e siècle, les plaques tournantes du développement du vignoble du bassin de la Loire sont Orléans, St-Pourçain et l’Anjou. Déjà exploité au 6e siècle, le vignoble de St-Pourçain, proche de l’Auvergne, est vigoureusement stimulé par les sirs puis les ducs de Bourbon (les Bourbonnais) qui règnent sur le duché (départements actuels de l’Allier et partiellement le Cher) jusqu’au 16e siècle. Tous les autres vignobles attenants à la Loire et ses principaux affluents (Sancerre, Saumur, Chinon, Vouvray, etc.) se développeront dans les sillons commerciaux des trois lieux-pivots ci-devant nommés, avec peu, sinon pas de décalage temporel. Est créé en 1214 le ‘Privilège de Bordeaux’ qui procure un avantage commercial aux vins des alentours immédiats de Bordeaux, excluant ceux du Médoc. Au fil des siècles, le ‘privilège’ se présente sous différentes formes de contraintes de commercialisation depuis Bordeaux − exemple: blocus temporaire de chargement sur bateau au port de Bordeaux −. Le ‘privilège’ sera aboli en 1776 en vertu de l’édit royal promulguant la libre circulation du vin dans le royaume de France. |
H ⇒ 16e au 18e siècle
Société et vin
Dans les sept provinces des Pays-Bas à majorité protestante constituées en confédération (1579-1795) est établie une forte mentalité commerciale. Vers 1670, les trois quarts des bateaux de toute l’Europe appartiennent à la flotte commerciale de la Hollande, une des sept provinces. Durant les quatre siècles suivants, par leur entrepreneuriat, leurs habilités commerciales et leur capacités logistiques, les hollandais développent un empire commercial sur les pays de la mer du Nord. Pour les hollandais, le vin est une opportunité d’affaires. Ils interviennent dans l’élevage du vin et sur la nature des produits en les modifiant, notamment pour leur apporter une plus-value et couvrir diverses gammes, dont celle des eaux-de-vie. En France, leur puissante influence commerciale s’étend surtout sur les vignobles liés à l’Atlantique par des voies fluviales. Après deux siècles de commerce intensif dans les vignobles de France, la production privilégie de plus en plus les vins de masse, à faible prix de revient. Au cours du dernier quart du 17e, les britanniques sont les premiers à adopter le vin mousseux; puis les français dans la foulée, avec ferveur. Sous Louis XVI, par un édit de 1776, la libre circulation commerciale du vin est promulguée dans tout le royaume. La donne des marchés en est remaniée. Ainsi, des marchés auparavant peu ou non rentables s’ouvrent en vertu de l’abolition des octrois (droits de passage), en maints endroits. Au cours de la période couvrant la fin du 16e et le 17e siècle, le ‘vin issu de raisins à peau rouge’ subit une métamorphose considérable. Vinifié auparavant selon une très courte cuvaison et un élevage sommaire, il sera dorénavant élaboré avec davantage de couleur et de corps, au moyen d’une extraction tangible et un élevage allongé. C’est aussi le moment correspondant à l’industrialisation de la bouteille, contenant qui confère alors une meilleure capacité de vieillissement au vin. |
Vignoble
Du 16e au 18e siècle, le vin blanc et le vin clairet constituent la production bordelaise principale. Il a été dit que le vignoble d’Orléans fut important pendant près d’un millénaire. Ce milieu fut précurseur de vins de qualité. L’ouvrage ‘Manière de bien cultivé la vigne, de faire la vendange, et le vin dans le vignoble d’Orléans’ de Jacques Boullay et Marie-Rose Simoni-Aurembou, publié en 1703, connu un succès qui s’est confirmé par sa réédition à deux reprises en vingt ans. Au début du 17e, près de Verzenay, le vignoble du Château de Sillery, propriété de Pierre Brûlat, marquis de Syllery et homme d’État doté d’un puissant réseau d’influence auprès de la Cour, aurait été le foyer du développement de la Montagne de Reims en Champagne, en vin effervescent. Durant la deuxième segment de ce siècle, le vin de Champagne tranquille a néanmoins la cote. Sa finesse et son degré d’alcool modéré gagne la faveur des médecins. Les poètes le louangent. Au 17e et 18e siècles, les vignobles ligériens en aval de Vouvray sont largement exploités par le commerce hollandais. Le prélèvement de taxes à la frontière de la Bretagne sur la Loire − le frais douanier en question fut maintenu en dépit de la réunion de la Bretagne au royaume de France − aurait favorisé une production de bon niveau en amont, notamment en Touraine et dans le Saumurois, à partir du qualitatif Chenin. En contre-partie, dans la région bretonne du Muscadet, non assujettie évidemment au droit de passage en territoire breton, la production prévalente, issue du Melon et du Gros-Plant, est associée à un créneau de prix inférieur. Jusqu’au 17e siècle, le vignoble languedocien est éclipsé par le développement des vignobles septentrionaux qui sont plus près des marchés riches de la mer du Nord. Sur le marché du royaume de France, il est aussi pénalisé par le protectionnisme exercé en divers endroits. Deux facteurs favorables à l’essor du vignoble méditerranéen surviennent toutefois au 17e: l’inauguration du canal du Midi en 1681 qui ouvre l’accès à l’Atlantique via la Gironde; et bien entendu la levée en 1776 des contraintes à la circulation du vin à la grandeur du royaume. Aussi, la demande grandissante du marché parisien y puisera dorénavant, en partie, son approvisionnement lors des millésimes déficients dans les vignobles du Nord de la France. La production languedocienne est alors qualitative. Des vins de Crus du Beaujolais sont produits au cours du 16e, puis ils sont exportés à Paris au siècle suivant, conjointement à des expédition de vin du maçonnais. Il est étonnant que la sous-région du Nord du Beaujolais se soit tournée vers Paris en tant que principal débouché. Le phénomène est d’autant plus étrange que le prix du produit n’est pas élevé et que, pour éviter les barrières payantes en Bourgogne, le parcours vers Paris est exigeant: d’abord une première étape pour rejoindre la Loire à un cinquantaine de kilomètre à l’Ouest, puis une seconde sur le fleuve jusqu’à Orléans et, de là, une dernière vers Paris. Au 17e et 18e siècles, les hollandais encouragent la viticulture du Sud-Ouest, dans le bassin de l’Adour et ses périphéries, les secteurs de Jurançon, Madiran, etc. Leur demande pour les raisins à faible prix de revient destinés à la fabrication d’eaux-de-vie donne lieu à la création de l’Armagnac. Plus au Nord, dans l’axe de la Dordogne qui est non assujetti aux ‘privilèges de Bordeaux’, les hollandais exercent une prééminence sur les vignobles de Bergerac et ses alentours tant leurs achats y sont considérables. La région méridionale des Côtes-du-Rhône, particulièrement celui du département du Gard (côté occidental du fleuve), a une expansion spectaculaire durant le deuxième segment du 18e. 1789-1793 – La vente des ‘Biens publics’ conséquente de la Révolution, comporte la disposition par encan d’un large patrimoine de vignes réputées ayant été confisquées à la noblesse et au clergé; notamment 1361 hectares de vignes en Côte d’Or. |
I ⇒ 19e siècle
Civilisation et vin
Invasion des maladies cryptogamiques au cours du siècle (oïdium, mildiou et phylloxera). Développement intensif du chemin de fer au milieu du 19e siècle. La ligne PLM (Paris, Lyon, Méditerranéen) est terminée en 1856. Le transport par train change à nouveau la donne de l’industrie du vin. Le Languedoc bénéficie de ce nouveau mode de transport et devient l’eldorado des petits vins. L’aramon est capable de livrer un rendement de 300 hl/ha! Création en France du Ministère de l’Agriculture en 1881. Adoption en 1884 de la Loi Waldeck Rousseau qui confère aux milieux vignerons la capacité de créer des syndicats professionnels dotés de personnalités civiles, aptes à générer des procès. Les syndicats seront de puissants agents de changement. |
Vignoble
Le développement du chemin de fer modifie considérablement le transport. Notamment, la pénétration des vins du Languedoc à Paris fut fulgurante. Ces vins d’excellents rapports qualité-prix supplantèrent implacablement ceux du vignoble du bassin parisien, dont la précarité due particulièrement à la climatologie aléatoire du milieu devint du coup un achoppement. Disparu depuis, le vignoble des alentours de Paris couvrait près de 25 000 hectares au milieu du 19e siècle. |
J ⇒ 20e siècle
Civilisation et vin
La Loi Griffe du 14 août 1889 fut le stade pionnier devant mener quelques décennies subséquentes aux Lois afférentes aux Appellations d’Origine. Le terme vin est réservé aux: « produits exclusifs de la fermentation du raisin frais ou du jus de raisin frais. » 1er août 1905, promulgation de la Loi relative à la répression des fraudes et des falsifications de produits ou de services. Entre 1905 et 1907, pour lutter judiciairement en vertu de ladite Loi, une vague de création de syndicats de viticulteurs a cours dans toute la France viticole. Dans maints cas, ces syndicats se désignent en tant que ‘syndicat de défense des intérêts viticole et agricole de … (endroit spécifique)’. Le décret de délimitation de la Champagne est passé le 17 décembre 1908. Dans la délimitation adoptée en Champagne, la qualité est prise en compte alors que l’objet de la Loi est strictement géographique … En 1916, le ratio quotidien de ½ litre par soldat s’est traduit par une consommation annuelle de 12 millions d’hectolitres par l’armée! La boisson de bas de gamme du soldat devient la boisson du peuple. Le pinard est ‘glorifié’ au cours des années subséquentes à 1919. 6 mai 1919, promulgation de la Loi du sur la protection des Appellations d’Origine (AO): Loi conséquente à l’échec des délimitations administratives. Les discussions sur celle-ci remontent au projet de Loi Jules Pams en 1913, donc avant la Première Guerre Mondiale. Cette autre loi confère à tout produit viticole la capacité à une ‘Appellation d’Origine’, déterminable en vertu de l’origine géographique des intrants, les raisins. La Loi a pour effet de reconfigurer à une échelle plus locale les syndicats et du coup à redessiner les enjeux intra-régionaux. Les produits factices et d’assemblages sont alors réprimés, notamment les ‘produits de marque’ issus généralement d’assemblages divers et commercialisés par l’intermédiaire du négoce. La Loi instaure notamment la tenue de registres d’entrée et sortie, permettant la traçabilité du vin de la vendange (déclaration de récolte) à la consommation. 2 juillet 1927, Loi complémentant celle du 6 mai 1919. L’article 3 stipule qu’indépendamment des prescriptions ‘relative à l’origine, aucun vin n’a le droit à une appellation d’Origine s’il ne provient pas de cépages et d’une aire de production consacrés par les usages locaux, loyaux et constants’. 1905-1931: dans le contexte de la surproduction nationale, la chaptalisation devient une préoccupation d’ordre national. Épisodiquement, à partir de 1905, lors des tractations nationales en préparation de Lois, des représentations sont conduites par les producteurs du Sud de la France visant la subrogation du droit de chaptaliser en vue contrer la surproduction. Notamment, en 1925, via La Ligue des Viticulteurs de la Gironde, la viticulture bordelaise manœuvre, puérilement, en faveur de la suppression du sucrage en première cuvée. À compter du milieu du siècle, la mécanisation du travail s’introduit graduellement le vignoble. |